25 février 2013 – Les Echos. Page 39.
LA CHRONIQUE de Éléna Fourès,
Il n’est pas souhaitable de « copiner » avec son patron. Il faut garder à son égard une juste distance et une posture appropriée, celle de la fonction. Ceci n’exclut nullement une relation chaleureuse et un climat d’interaction agréable. Selon la culture de l’entreprise, la distance entre un subordonné et son patron varie considérablement. Un jeune manageur, issu d’une entreprise française où l’on se vouvoyait, a éprouvé des difficultés à s’intégrer dans une entreprise américaine, où tout le monde se tutoyait. Il trouvait ce mode relationnel « bizarre » et peinait à appeler ses patrons par leur prénom. Une année plus tard, son assessment (évaluation à 360 degrés, NDLR) a révélé qu’il était perçu comme « distant » ou « coincé », ce qui a eu un impact négatif sur sa carrière.
Fixez-vous donc des repères de bon sens pour ne pas commettre d’erreurs de positionnement. N’oubliez pas que toute relation d’ordre hiérarchique est basée sur le respect mutuel et implique naturellement une certaine distance. Autre exemple sur le même thème que le précédent mais poussé à l’extrême : celui de cette femme cadre qui vouvoie sa patronne, tandis que sa supérieure hiérarchique, elle, la tutoie. Cette « asymétrie » de la relation a graduellement instillé un sentiment d’amertume chez la subordonnée qui, un beau jour, a provoqué un « clash » avec sa patronne sur un tout autre sujet, mais lui a brusquement reproché son manque de respect.
Un patron qui veut « copiner » cherche probablement à obtenir de la reconnaissance personnelle et s’inscrit dans un mode de management affectif. Ne rentrez pas dans ce jeu susceptible de vous «pomper » : toute dépendance, affective ou non, ne peut qu’aller en s’accroissant et donc exiger de toujours augmenter la « dose ».
Les avances amicales du patron peuvent même aboutir à de la manipulation pure. Je pense au cas d’une femme, manager dans l’audio-visuel, qui avait noué une très proche relation amicale avec sa patronne. Cette dernière l’invitait souvent chez elle, au point que leurs enfants respectifs étaient devenus amis. Quand la patronne a été limogée, on a proposé le poste à la femme manager. Cette dernière l’a refusé, incapable « de faire cela à son amie » et l’entreprise a recruté quelqu’un d’externe. « J’ai compris trop tard que je m’étais fait piéger », dit aujourd’hui la manageuse, restée enfermée dans un rôle de « second couteau ».