03 février 2014 – Les Echos. Page 37.
LA CHRONIQUE de Éléna Fourès,
La soirée des «alumni » est parfois un miroir cruel qui nous renvoie nos rêves d’il y a vingt ans. On s’y regarde et le verdict tombe : « Eux ont réussi, pas moi ». Oui, ces anciens collègues partis vivre des nouvelles aventures professionnelles ont réussi dans la vie et l’affichent.
Souvent dans les soirées des promos on trouve deux types d’ «alumni» garçons : des « vieux schnocks » et des « vieux beaux ». La première catégorie est accompagnée par des épouses, compagnes fidèles de tous les combats, au même taux d’usure que les maris, burinés par les vents de l’altitude hiérarchique. La seconde s’affiche avec des fraiches beautés, partie intégrante de la panoplie des vainqueurs. Autre tableau, côté« filles » : exceptions à la règle, elles affichent en plus de la réussite professionnelle la réussite personnelle, famille et enfants.
La joie des retrouvailles évaporée, chacun est vite rattrapé par la manie de la comparaison, ce vieux « virus mental » des bêtes de concours. Sauf qu’en l’absence de notes scolaires, on rivalise sur la base des signes extérieurs de réussite professionnelle : le prestige de l’entreprise à laquelle on appartient, un titre, une rémunération qui se devine, l’influence.
Et là, le constat est déprimant, car la comparaison sur de telles bases joue clairement en votre défaveur : vous n’avez ni titre ronflant, ni logo célèbre collé à votre ADN, ni grosse voiture de fonction, ni montre iconique. Et c’est là que vous vous dites :« Je n’ai pas réussi.» Stop ! Cessez de vous torturer. Il est absurde aujourd’hui de vous comparer à d’autres sur la base de leurs critères de réussite, sachant que vous vous avez fait des choix personnels différents vingt ans plus tôt.
Réussir dans la vie et réussir sa vie diffèrent du tout au tout. Vos camarades ont-ils réussi leur vie ? Quid des signaux intérieurs de réussite ? La passion de son métier, le bonheur, l’équilibre de vie, l’épanouissement, la sérénité ? Et de ce retour sur soi quotidien en mode « je suis OK » ?
Dites-vous, à la façon de Voltaire : » J’ai décidé d’être heureux car c’est bon pour la santé « . Changez votre regard sur vous-même et soyez fier de ne pas vous être trahi(e) quand à vos choix.